On a coutume de situer le début de la poésie française au IX° siècle. Le premier texte connu est La Cantilène ou Séquence de Sainte Eulalie, poème liturgique de vingt-neuf vers qui était chanté avant l’Évangile.
Mais tout commence réellement au XI° siècle, quand troubadours, en langue d’oc, et trouvères, en langue d’oil, dessinent le visage naissant de notre poésie lyrique.
Le midi de la France a joué un rôle essentiel dans l’essor de ce lyrisme. Pour un Guillaume d’Aquitaine (né en 1071) ou un Bertrand de Born (né en 1140), l’amour est la motion première de la vie.
A partir de 1150, cette idée gagnera le nord, et les trouvères la reprendront à leur compte. Chrétien de Troyes (né en 1135) et Thibaud de Champagne (né n 1201) en seront les hérauts majeurs.
Ce lyrisme courtois est le fait de princes et de chevaliers, mais aussi de clercs et de balladins.
Vers le XIII° siècle, la poésie arrive en ville, descend dans la rue et même dans le ruisseau.
C’est là où vont la ramasser Rutebeuf (né en 1250) et Villon (né en 1431), les deux grands poètes maudits du Moyen-Âge.
Si la Renaissance, historiquement parlant, va des guerres d’Italie aux guerres de religion (Marignan 1515 – Massacre de la Saint-Barthélémy 1572), elle désigne aussi et surtout un ensemble d’événements artistiques et culturels qui, sous l’impulsion des Humanistes, marquent le début des temps modernes.
Comme son nom l’indique, la Renaissance entendait faire renaître la culture antique tout en illustrant les langues nationales. Mais le caractère le plus original de la poésie de la Renaissance est le rapport qui s’y instaure entre la subjectivité et le langage.
Autour de Ronsard et sous la bannière de la Pléiade, se réunirent, à partir de 1549, Du Bellay, Belleau, Jodelle, Baïf, qui donneront à la poésie française quelques-uns de ses plus beaux fleurons.
Dans cette période agitée de l’histoire européenne, entre Renaissance et Siècle des Lumières ou, pour la situer littérairement, entre Ronsard et La Fontaine, le baroque désigne un type intemporel de sensibilité artistique contrastant avec le classicisme, cherchant même à l’ébranler.
En poésie, le baroque se traduit par une vigueur imaginative, des rapprochements incongrus, des jeux verbaux souvent téméraires, des notations caricaturales, en un mot, de la fantaisie.
Malherbe excepté, l’écrivain baroque est plus proche du “poète crotté” que du poète bourgeois. Le voici capitaine ou soldat (Racan, d’Aubigné, du Bartas), diplomate d’occasion ou ecclésiastique à la vie dissolue (Chassignet, Mathurin Régnier), aventurier ou pamphlétaire (Saint-Amant, Tristan l’Hermite, Théophile de Viau).
L’un des plus célèbres parmi ces poètes, Vincent Voiture, deviendra le brillant animateur de l’ “Hôtel de Rambouillet”, haut lieu de la vie mondaine et littéraire en France durant la première moitié du XVII° siècle.
De tous ces poètes que réunit la bannière du Classicisme, les premiers, comme Scarron, commencent leur œuvre sous le règne de Louis XIII, les derniers, comme Florian, l’achèvent pendant la Révolution.
La poésie des XVII° et XVIII° siècles offre le pire et le meilleur, mais se nourrit des mêmes principes de l’esthétique classique : celle-ci puise aux sources de l’Antiquité, et impose de ne mélanger ni les tons ni les genres.
Ainsi fleurissent l’épopée, l’ode, les stances, l’élégie, l’épître, la satire, la fable et l’épigramme, sous la plume de Scudéry, Corneille, La Fontaine, Boileau, Racine, Voltaire, Gilbert, Parny.
La tourmente révolutionnaire emportera cette société d’Ancien Régime.
Le 13 Septembre 1794, Florian meurt des suites de son emprisonnement sous la Terreur.
Quelques semaines plus tôt, André Chénier montait à l’échafaud. On verra en lui, à partir de 1819, le premier des poètes romantiques.
Dernier poète classique, André Chénier sera tenu pour un maître par la génération romantique dès 1819, année de la publication de ses Œuvres complètes. Sa formule : “L’art ne fait que des vers ; le cœur seul est poète” pourrait être la devise du Romantisme.
Né en Angleterre et en Allemagne, annoncé par Chateaubriand dès 1801, ce mouvement s’affirme en France avec la publication par Lamartine, en 1820, des Méditations poétiques. La nature, l’amour, l’ailleurs et l’au-delà, complétés par l’exotisme et la spéculation métaphysique, sont les composantes du lyrisme romantique.
Contemporain de Lamartine, musicien du cœur et de l’âme, Alfred de Vigny “moraliste épique” se veut un nouveau prophète.
Alfred de Musset dans les Nuits, met en scène le dédoublement.
Gérard de Nerval, lui, avec les sonnets des Chimères, atteint un degré de mystère inégalé.
À côté de ces grands noms, Marceline Desbordes-Valmore, Aloysius Bertrand, père du poème en prose, Maurice de Guérin, Pétrus Borel le lycanthrope, furent injustement ignorés de leur temps. Avec leur poésie élégiaque ou noire, pittoresque ou mythique, ils retrouvent ici la place qui leur est due.
Géant littéraire du XIX° siècle, chef de file des Romantiques et témoin majeur de son temps, Victor Hugo reste le poète et l’écrivain le plus populaire en France et peut-être dans le monde ; le plus “inspiré” aussi, son œuvre est immense : des milliers de pages dont près de trois mille pour la seule poésie.
Il était difficile de choisir dans cet océan. Nous avons tenté de présenter la partie la plus significative des principales facettes de ce génie poétique.
De toutes ses œuvres, les Contemplations (1856) et la Légende des siècles (1859, 1877, 1883) sont deux monuments de notre grande poésie lyrique.
Le 22 Mai 1885, la France fit à Victor Hugo des funérailles nationales avant de l’installer au Panthéon.
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En 1866 paraît chez l’éditeur Alphonse Lemerre la première série du Parnasse contemporain, recueil de vers nouveaux, qui rassemble une quarantaine de poètes. Parmi eux, Leconte de Lisle, Théophile Gautier, Théodore de Banville et José Maria de Heredia sont déjà connus ou célèbres. Avec Sully Prudhomme et François Coppée, ils formeront le noyau central du Parnasse.
Celui-ci ne sera jamais une “école”, un manifeste ou un mouvement, mais plutôt la réunion, par Catulle Mendès, d’amis n’ayant “rien de commun sinon la jeunesse et l’espoir, la haine du débraillé et la chimère de la beauté parfaite”.
Entre Romantisme dont il dénonçait le “sentimentalisme” et Symbolisme qu’il a préparé par son travail formaliste sur le langage, Le Parnasse aura été, de 1866 à 1893 (parution des Trophées de Heredia) une étape importante dans l’évolution de l’écriture poétique.
Baudelaire peut être considéré comme le dernier des Romantiques. Mais avec lui, et à partir de lui, la poésie française se libère à jamais des règles qui semblaient l’avoir figée, pour toujours, en l’état.
Publié la première fois en 1857, le recueil des Fleurs du mal – dont certains poèmes feront scandale – sera la création de toute une vie. On a comparé la poésie de Baudelaire à une alchimie spirituelle qui change la boue en or.
Avec Les Chants de Maldoror, parus en 1868 et 1869, Lautréamont devient l’héritier satanique de Baudelaire. Son œuvre, mystérieuse dans sa fulgurance, fascinera plus tard les Surréalistes, André Breton surtout.
Tristan Corbière , lui, poète à la vie brève et difficile, est, comme Lautréamont, l’auteur d’un seul livre, Les Amours jaunes (1873). Passé inaperçu à la publication, le recueil, avec son ironie grinçante et son écriture désarticulée, sera révélé par Verlaine dix ans plus tard. Corbière est l’héritier moderne de Villon.
La rencontre entre Verlaine et Rimbaud est un moment crucial dans l’histoire de la poésie moderne.
Si Baudelaire est le précurseur ou le “père” de cette poésie, du moins sous la forme du poème en prose, Rimbaud, aiguillonné par Verlaine, en est le héros absolu.
Une saison en enfer et Illuminations sont à la fois un adieu à “la vieillerie poétique” et la traduction des orages entre Verlaine et Rimbaud, de leur connivence spirituelle aussi.
De la même façon, on prête à Rimbaud une réelle influence dans la conception des Romances sans paroles de Verlaine, qui marquent un tournant formel après les poèmes plus mièvres de La Bonne chanson.
A côté de Verlaine et de Rimbaud, Laforgue, Cros et Nouveau sont d’autres héros pathétiques de l’aventure poétique moderne.
Héritage tardif du Romantisme, réaction contre le Parnasse et les valeurs bien-pensantes de la fin du XIX° siècle, le Symbolisme veut exprimer ce qu’il y a de plus sensible et de plus secret dans l’âme humaine. Cependant, il s’agit de suggérer plutôt que de décrire.
La poésie symboliste puise également sa substance dans la légende, le mythe, l’allégorie et le rêve.
Les symbolistes vénèrent Baudelaire et ses “correspondances”, mais se réclament aussi de Nerval et de Verlaine.
Stéphane Mallarmé sera la figure de proue de ce mouvement. À partir de 1880, dans son appartement de la rue de Rome, une génération entière viendra, chaque mardi, recueillir la parole du maître : Henri de Régnier, Stuart Merrill, Remy de Gourmont, René Ghil, Jean Moréas, Saint-Pol Roux, Francis Vielé-Griffin, Emile Verhaeren, Albert Mockel, Gustave Kahn.
Tous ces poètes, et quelques autres, sont ici réunis autour de Mallarmé, qui est devenu un phare de la poésie française, même mondiale.
Après 1905, le Symbolisme, lui, sera tenu pour mort et laissera place au Modernisme.
